RIMBAUD Loup : Virologue & modélisateur en épidémiologie et évolution

RIMBAUD Loup

Chargé de recherche, Equipe Virologie - Modélisateur en épidémiologie et évolution

Depuis le 1er septembre 2018, je suis chargé de recherche dans l’équipe Virologie de l’unité Pathologie végétale. Mes recherches visent à identifier des stratégies de gestion efficaces, durables et rentables des maladies végétales, en particulier celles causées par les virus sur les plantes cultivées.

ACTIVITES DE RECHERCHE

Je m’appuie sur des modèles de simulation spatiotemporels, complétés par des expérimentations en laboratoire ou sous serre, et l’analyse statistique de données épidémiologiques acquises sur le terrain. Ces expérimentations et données de terrain apportent des connaissances précieuses sur la biologie des interactions des agents pathogènes avec leurs plantes hôtes et éventuellement leurs agents vecteurs. En effet, outre la possibilité de calibrer certains paramètres des modèles de simulation ou de tester certaines prédictions, ces connaissances permettent également d’identifier les mesures de gestion les plus adaptées, ou des voies de lutte innovantes. Enfin, pour que de telles recherches aient un impact sur nos pratiques agricoles, il est essentiel pour moi d’identifier des stratégies qui répondent aux besoins de la profession agricole, et de les communiquer.

1. Modélisation de stratégies de lutte contre les épidémies

Les modèles de simulation sont particulièrement utiles pour optimiser les stratégies de gestion des épidémies, et s’affranchissent des contraintes éthiques, légales, logistiques ou financières associées aux expérimentations sur de grandes échelles spatio-temporelles. Mes modèles simulent la dynamique épidémique des agents pathogènes dans un paysage cultivé et soumis à une stratégie de lutte, en vue d’optimiser les modalités de cette stratégie. Les agents pathogènes ont cependant une extraordinaire capacité à s’adapter et contrecarrer les méthodes de lutte déployées sur le terrain, en particulier celles qui s’appuient sur l’emploi de variétés résistantes. En incluant l’évolution des agents pathogènes, les modèles épidémio-évolutifs que j’utilise permettent donc d’identifier des stratégies à la fois efficaces et durables pour la gestion des maladies des plantes.

Développement du package R landsepi (landscape epidemiology)

En collaboration avec l’unité BioSP (Biostatistique et processus spatiaux, centre INRAE Provence-Alpes-Côte d’Azur, Avignon) et le CSIRO (Canberra, Australie), j’ai contribué au développement du package R landsepi (Landscape Epidemiology and Evolution), téléchargeable en suivant ce lien [https://cran.r-project.org/package=landsepi]. Ce package permet d’étudier tout un panel de stratégies de déploiement de la résistance contre les agents phytopathogènes, en particulier :

  • la rouille du blé, causée par les champignons du genre Puccinia
  • le mildiou de la vigne, causée par l’oomycète Plasmopara viticola
  • la cercosporiose noire du bananier, causée par le champignon Pseudocercospora fijiensis
  • le virus de la mosaïque du concombre (CMV) et le virus Y de la pomme de terre (PVY) sur piment

Diverses stratégies peuvent ainsi être comparées vis-à-vis de leur performance épidémiologique (santé des plantes), évolutive (durabilité de la résistance) et économique (rentabilité). Le modèle dispose en outre d’une interface web shiny  à vertu pédagogique.  

Stratégies de déploiement de la résistance des plantes. La gestion durable de la résistance passe par le choix de la source de résistance et son déploiement dans le temps et l’espace avec pour objectif de limiter voire empêcher son contournement par les agents pathogènes.
© Loup RIMBAUD/INRAE

Stratégies de déploiement de la résistance des plantes. La gestion durable de la résistance passe par le choix de la source de résistance et son déploiement dans le temps et l’espace avec pour objectif de limiter voire empêcher son contournement par les agents pathogènes.
Adapté de Rimbaud L., Fabre F., Papaïx J., Moury B., Lannou C., Barrett L. and Thrall P. (2021). Models of plant resistance deployment. Annu. Rev. Phytopathol. 59:125-152.

 

 

 

Exemples de simulation de paysages en mosaïque de 3 variétés. Un algorithme permet de contrôle les proportions et niveau d’agrégation des différentes variétés.
© Loup RIMBAUD/INRAE

Exemples de simulation de paysages en mosaïque de 3 variétés. Un algorithme permet de contrôle les proportions et niveau d’agrégation des différentes variétés.
Tiré de Rimbaud L, Papaïx J, Rey JF, Barrett LG and Thrall PH (2018). Assessing the durability and efficiency of landscape-based strategies to deploy plant resistance to pathogens. PLoS Comput. Biol. 14:e1006067.

 

 

 

 

 

 

Architecture SEIR du modèle : Les hôtes sains peuvent être infectés par des propagules. Après une période de latence, les hôtes infectés produiront de nouvelles propagules pendant toute la durée de la période infectieuse. Les propagules peuvent muter et se disperser dans le paysage.
© Loup RIMBAUD/INRAE

Architecture SEIR du modèle. Les hôtes sains peuvent être infectés par des propagules. Après une période de latence, les hôtes infectés produiront de nouvelles propagules pendant toute la durée de la période infectieuse. Les propagules peuvent muter et se disperser dans le paysage. Une interface pédagogique des modèles SEIR est disponible ici [https://loup.shinyapps.io/loup_demo_shiny/].
Adapté de Rimbaud L, Papaïx J, Barrett LG, Burdon JJ and Thrall PH (2018). Mosaics, mixtures, rotations or pyramiding: What is the optimal strategy to deploy major gene resistance? Evol. Appl. 11(10):1791-1810.

 

2. Compréhension des interactions plantes-virus-vecteurs par l’expérimentation

Pour identifier des stratégies de lutte adéquates et performantes, il est essentiel de bien comprendre la biologie des interactions entre agents pathogènes, plantes hôte, et agents vecteurs.

2.1 Gestion des épidémies de CMV à Espelette
Gestion des épidémies du virus de la mosaïque du concombre (CMV, Bromoviridae, Cucumovirus) sur piment d’Espelette

Il est notamment crucial d’identifier les facteurs clés de la propagation des épidémies. C’est l’objectif de mes recherches sur le virus de la mosaïque du concombre (CMV, Bromoviridae, Cucumovirus), dont la récente émergence cause des dégâts considérables sur le piment d’Espelette. Par le biais de missions d’échantillonnages de terrain, de méthodes de diagnostic sérologique et moléculaire en laboratoire et d’analyses statistiques, j’explore les différentes voies de dissémination du CMV à Espelette.

 

 

Le virus de la mosaïque du concombre est un virus multi-partite composé de 3 particules contenant chacune un ARN de polarité positive. Il infecte une gamme d’hôtes exceptionnellement large, dont le piment d’Espelette. Il se transmet par la graine chez certaines plantes hôtes, et par plus de 80 espèces de pucerons selon le mode non-persistant.
© Loup RIMBAUD/INRAE

Le virus de la mosaïque du concombre est un virus multi-partite composé de 3 particules contenant chacune un ARN de polarité positive. Il infecte une gamme d’hôtes exceptionnellement large, dont le piment d’Espelette. Il se transmet par la graine chez certaines plantes hôtes, et par plus de 80 espèces de pucerons selon le mode non-persistant.

 

2.2 Evaluation de la résistance variétale du piment au PVY

L’emploi de résistances variétales permet notamment d’inhiber certaines des interactions entre la plante hôte et le virus. La résistance des plantes se traduit en effet par une diminution (possiblement totale) de la capacité du parasite à infecter, coloniser, ou exploiter son hôte pour son propre développement. Cependant, si de nombreux mécanismes moléculaires d’immunité des plantes ont été élucidés, très peu de données précises existent quant à leur effet sur les principales étapes du cycle infectieux. Ces données sont précieuses pour calibrer les modèles de simulation (notamment les étapes 1 à 4 de l’architecture SEIR, voir plus haut) destinés à évaluer plusieurs types de résistance variétale. Mes expérimentations visent donc à caractériser différentes sources de résistance chez le piment (Capsicum annuum) contre le potato virus Y (Potyviridae, potyvirus).

Nos premiers résultats montrent que le taux d’infection (étape 1) du PVY par puceron est légèrement inférieur chez une accession résistante (Perennial) que chez une accession sensible (Yolo Wonder). Cependant cette différence est trop faible pour expliquer le niveau de résistance constaté au champ chez l’accession résistante, qui doit probablement également inhiber d’autre étapes du cycle infectieux.
© Loup RIMBAUD/INRAE

Nos premiers résultats montrent que le taux d’infection (étape 1) du PVY par puceron est légèrement inférieur chez une accession résistante (Perennial) que chez une accession sensible (Yolo Wonder). Cependant cette différence est trop faible pour expliquer le niveau de résistance constaté au champ chez l’accession résistante, qui doit probablement également inhiber d’autre étapes du cycle infectieux.

TRANSFERT DE CONNAISSANCES

1. Enseignement (niveau Master)

Je réalise annuellement des interventions d’enseignement autour de deux principaux thèmes :
    - les bases de phytopathologie générale
    - les approches mathématiques pour évaluer les stratégies de déploiement de la résistance ;
dans 4 établissement différents :
   - Avignon Université :
         Gestion et Qualité des Productions Végétales (GQPV, M1)
         Ingénierie Filière Fruits & Légumes (I2FL, M1)
   - Université Paris-Saclay : De l’Agronomie à l’AgroEcologie (AAE, M2)
   - Montpellier SupAgro :
        Protection des Plantes et Environnement (PPE, M2)
        Amélioration des plantes et ingénierie des plantes tropicales et méditerranéennes (APIMET & SEPMET, M2)
   - Swedish University of Agricultural Sciences : Plant biology for breeding & protection (M2)

2. Encadrement doctorante

Depuis 2022 : Elise Lepage (AgroParisTech IPEF, co-directeur) : Emergences à l’interface agro-écologique : le rôle des réservoirs naturels sur les dynamiques épidémique et évolutive des agents pathogènes

3. Encadrement post-doctorante

Depuis 2021 : Marta Zaffaroni (INRAE, co-encadrant) : Stratégies de diversification des gènes de résistance pour gérer les agents pathogènes dans les agro-écosystèmes : approches théoriques et application aux vignobles français.

4. Encadrement de stagiaires Master

  • 2023 : Manon Couty (M2 INSA Lyon, co-encadrant) : Modélisation spatio-temporelle des épidémies : comment diversifier les paysages agricoles ?
  • 2022 : Ulysse Caromel (L3 Avignon Université, encadrant principal) : Analyse d’image pour mesurer la résistance du piment au PVY
  • 2021 :
    • Elise Lepage (M2 AgroParisTech, encadrant principal) : Itinéraire d’un virus fluorescent : Etudier la résistance du piment au Potato virus Y
    • Pauline Bouvet (2nde, Cité Scolaire du Diois, encadrant principal) : Stage de découverte en milieu professionnel.
  • 2020 :
    • Pierre Mustin (M2, encadrant principal) : Evaluation de la résistance des plantes à la transmission des virus
    • Clarisse Vincent (M2, co-encadrant) : Assurer la durabilité des résistances à la cercosporiose noire de nouvelles variétés de bananiers
  • 2019 : Jean-Loup Gaussen (M2, co-encadrant) : Développement d’outils spatiaux pour le package R landsepi
  • 2014 : Samuel Marchat (M1, co-encadrant) : Développement d’un protocole de détection précoce du virus de la sharka dans des Prunus